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Les Chroniques de Lyane

Il vient de sortir le 15 août ! J'ai aimé passer quelques heures sur l'Ile de Sein grâce à la plume de Alain Pyre.


Avis : ENVOÛTANT


Quand un roman vous fait vivre la vie des insulaires…

1902. Catherine se réveille dans un lit qui n’est pas le sien ! Que fait cette héritière de la bourgeoisie quimpéroise dans le lit d’un prêtre ? Sur une île qu’elle ne connait pas ! Comment Charles pourra-t-il l’aider à résoudre toutes les questions qu’elle a dans la tête ?

Quand elle retrouve sa famille et qu’elle doit revenir à une vie normale en se mariant, l’île de Sein ne pourra pas sortir de sa mémoire. Au point d’y revenir ?

Que j’ai aimé découvrir cette île et la vie quotidienne suspendue aux tempêtes et aux vents qui la tiennent sous leur joug. Entre les quelques jours lumineux qui l’ensoleillent et la plus grande partie de l’année durant laquelle rester à l’abri s’impose, les habitants du début du vingtième siècle ne connaissent guère de répit dans leur existence aux quatre vents. Mais l’auteur donne l’envie de comprendre Catherine qui au fil des pages en deviendra de plus en plus prisonnière de cœur.

 

Si Alain Pyre m’avait séduite avec les descriptions de ses paysages de montagne dans ses romans précédents, il m’a tout autant époustouflée par sa connaissance de la mer et des phares : les paradis, les purgatoires et les enfers, dans celui-ci.

La fureur des vagues, les embrasements du ciel, la rigueur des températures pourraient donner l’impression d’un roman grand large mais c’est à une sorte de huis clos que nous assistons entre un monde bourgeois et étriqué et un microcosme protecteur, libre et sauvage. Il y a peu de personnages, une jeune fille, en passe d’être la honte de la famille prend toute la place. Elle est libre, généreuse, enthousiaste et prête à tout pour ne pas vivre dans un milieu favorisé mais hostile à son goût d’indépendance. Et un prêtre qui s’interroge pour savoir s’il va poursuivre sa mission.

Le souffle marin se perçoit durant la lecture qui se fait aisément, car l’attente de savoir ce qu’il va advenir des personnages riches intérieurement et émouvants, se fait de plus en plus prégnante au fil des pages.

 

De l’action, des dialogues mettant souvent en face à face une fille et ses parents, une correspondance secrète, vous l’aurez compris, je vous invite à une pause lecture dépaysante sous les coups de boutoir de la mer d’Iroise.

 

Notes : Fond : 4.9/5 Forme : 4.9/5

Citations :

. Une belle naissance n’avait jamais fait à elle seule une belle personne.

. Il arguait que l’esprit humain diffère peu, selon que les mains qui le servent sont couvertes de gants de soie ou de callosités.

Extrait : Vendredi 7 mars 1902

Je savais que je rêvais, mais ma lucidité s’arrêtait là. Je penchais pour un songe agité, plutôt qu’un cauchemar. Une odeur ou un bruit m’aurait aidée ; rien ne filtrait cependant de la clarté diffuse qui agressait mes yeux. Sortir ? Rester ? Attendre ?

Impossible d’estimer depuis combien de temps je me trouvais dans cet état. Le coussin indocile ne m’était d’aucun secours. Tout mon corps souffrait de l’inconfort de la couche. Dix fois, je voulus ouvrir les paupières ; jamais elles ne m’obéirent. Je me débattais dans une matière hostile. Une moitié de moi transpirait, l’autre frissonnait. Jouet du hasard, j’avançais à reculons, hésitais, me cabrais, puis sanglotais. Quand allais-je me réveiller ?

Une porte grinça, je me recroquevillai et enfonçai la tête sous la couverture. Peu à peu, le monde redevenait clément. Quel tumulte pour si peu de choses !

En cette fin d’hiver, le silence se parait de notes printanières. J’étais à nouveau Catherine qui venait de souffler vingt-trois bougies. La vie m’appartenait.

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